José Francisco Rodríguez Queiruga, plus connu sous le nom de Francisco Queiruga, est un économiste espagnol. Il est également conseiller fiscal, conférencier et écrivain. Né en janvier 1960 à La Corogne en Galice, Francisco a obtenu plusieurs diplômes, l’un en sciences économiques à Saint-Jacques de Compostelle et l’autre en droit de l’Union Européenne à l’Institut des hautes études européennes à Strasbourg. Il s’est ensuite installé à Paris où il a été nommé secrétaire général de la Chambre de commerce espagnole en 1995 puis directeur général. Depuis octobre 2013, il occupe la fonction de président de la Chambre de commerce latino-américaine – CCLAM. J’ai souhaité en savoir davantage sur cette organisation internationale créée en avril 1929 à Paris.
Par Diane Cardoso-Gomes, fondatrice de Paris Latina News

Bonjour Francisco, quel est le rôle de la Chambre de commerce latino-américaine ?
Francisco : La Chambre de commerce latino-américaine a un rôle similaire à toutes les autres Chambres de commerce. Cependant on distingue plusieurs types de Chambres de commerce : les Chambres de commerce nationales, les binationales et les multinationales. Pour les Chambres de commerce nationales par exemple on a la Chambre de commerce de Paris, c’est un régime de droit public qui s’occupe de la promotion de Paris. Pour les Chambres de commerce binationales nous avons l’exemple de la Chambre de commerce d’Espagne en France où je m’occupais du développement des relations commerciales entre l’Espagne et la France. Enfin il y a l’autre type de Chambre qui est la Chambre de commerce latino-américaine qui représente les intérêts de la France par rapport à de nombreux pays qui sont dans le monde latino-américain.
Il y a un travail de communication et de marketing pour rendre visible l’activité de certaines entreprises dans certains pays. Il faut que cette activité de communication soit doublée d’une activité de formation quand c’est possible, que ce soit à travers des séminaires ou des conférences. Quand on nous le demande, il faut faire des missions d’accompagnement, d’analyse ou de lobbying.
En quelques mots, la Chambre de commerce latino-américaine est la représentation commerciale, diplomatique, l’accompagnement, la formation et une partie des lobbies aussi parce que nous avons la possibilité d’avoir des contacts dans des ambassades ou dans des organismes officiels. De nombreuses entreprises ne savent pas comment arriver dans un pays. Nous pouvons le faire plus facilement qu’une entreprise étant donné que nous sommes une organisation.
Quels sont les critères pour entrer dans une Chambre de commerce ?
Francisco : La plupart des membres des Chambres de commerce sont des entreprises. En revanche, il y a aussi des membres à titre privé, des professeurs, des artistes ou des professions libérales. Pour en revenir aux entreprises, normalement quand une entreprise se présente, elle a une demande particulière, soit il y a eu un problème avec une autre société et elle se demande comment il faut agir. Faut-il faire une demande judiciaire ? Comment cela fonctionne exactement ? Est-ce qu’on peut se faire accompagner par quelqu’un ? La plupart du temps, les gens ne connaissent pas les droits dans notre pays et ne savent pas comment il faut réagir et face à qui.
Combien de pays sont représentés par la Chambre de commerce latino-américaine aujourd’hui ?
Francisco : Nous travaillons avec 20 pays de langue hispanique, cela veut dire les pays du continent américain où l’on parle espagnol. Beaucoup de pays latino-américains ont un organisme qui dépend des ambassades. Ce ne sont pas des Chambres de commerce, c’est ce qu’on appelle par exemple Pro Colombia, Pro Mexico qui sont des organismes dépendant des ambassades et ils n’ont pas la possibilité d’offrir les mêmes services qu’une Chambre de commerce. Alors quand on parle des ambassades, comme Pro Mexico ou Pro Colombia, la définition de leurs potentielles actions est beaucoup plus limitée. Ce sont des organismes qui dépendent du monde diplomatique ou des ambassades mais ce sont des organismes avec du capital privé et limités à certains types d’actions. Par exemple, une action où je peux accompagner quelqu’un d’un point de vue juridique et lui expliquer comment faire une médiation ou une négociation. Avec la Chambre de commerce cela est possible.
Quelles ont été les grandes actions effectuées par la CCLAM cette année ?
Francisco : Cette année, on a travaillé sur des missions de communication. On peut réaliser des actions qui peuvent sembler loin de l’objectif mais qui ont un sens comme par exemple des déplacements à plusieurs reprises à Brazzaville (République du Congo) ou au Gabon dans le but de faciliter l’introduction des sociétés qui avaient des intérêts à vendre un certain type de produit.
Je suis intéressé par la promotion de la ville de Shanghai, la manière dont ils utilisent un système douanier de gestion des investissements qui peut prêter un grand intérêt pour des sociétés colombiennes ou mexicaines qui sont à la frontière des pays comme les États-Unis. Cela serait un modèle de travail intéressant et qui leur donnerait beaucoup plus d’attractivité et beaucoup plus d’argent, de valeur ajoutée dans les zones douanières qui resteraient dans le pays. Donc c’est ce type d’action cette année fondamentalement que je menais à Brazzaville et à Shanghai.
En parlant des États-Unis, comment définiriez vous la relation entre la CCLAM et la Chambre de commerce américaine en France ?
Francisco : La relation avec la Chambre de commerce américaine en France est plutôt une relation d’amitié avec les responsables. Il n’y a pas de relation particulière d’action entre nous.
Quels sont les pays avec lesquels vous travaillez essentiellement ?
Francisco : J’ai travaillé ces trois dernières années avec la Colombie principalement, le Chili, l’Uruguay et le Mexique.
Je connais bien l’Uruguay, j’avais adoré Montevideo, je trouve que les liens qui unissent les uruguayens avec la France sont très forts. J’avais rencontré à Paris l’ambassadeur Omar Mesa Gonzalez, également délégué permanent de l’Uruguay auprès de l’UNESCO à l’époque. D’ailleurs j’ai lu que vous aviez des rapports avec l’UNESCO…
Francisco : Oui c’est exact, en tant que président de la CCLAM, je suis dans plusieurs organisations, par exemple, même si mon mandat finit en 2024, je suis secrétaire général du comité mondial pour les apprentissages tout au long de la vie. C’est un organisme qui est agréé par l’UNESCO, nous essayons de rapprocher les différents pays du monde à travers la formation et l’accès à l’apprentissage pour l’intégration et l’inclusion de toutes les personnes, quels que soient les races, les sexes, les religions etc. En 2023, nous sommes allés en Egypte, on a fait un travail assez important avec l’université Senghor à Alexandrie sur les principes de la formation et l’apprentissage à la santé. On a fait la même chose à Madrid et à Bruxelles sur la question de la responsabilité sociale d’entreprise.
J’imagine que vous retournez souvent en Espagne…
Francisco : Oui bien sûr, pendant 20 ans j’ai été secrétaire général de la Chambre de commerce d’Espagne cela m’a permis de maintenir beaucoup de contacts avec des entreprises. Mon réseau fait que l’on m’appelle souvent pour donner des conférences.
Quels sont vos centres d’intérêt ?
Francisco : Ils sont multiples en fait, j’écris beaucoup. À peu près 200 articles dans différents types de publications. J’ai publié un livre personnel et 5 en collaboration. J’aime beaucoup la peinture et le dessin depuis longtemps. Ce qui me passionne également c’est la communication, j’anime des conférences et je donnais des cours à la Sorbonne à mes élèves en Master CEILA (Centre d’études ibériques et latino-américaines).
C’est intéressant, j’ai fait mon second master dans le même UFR d’études ibériques et latino-américaines à Paris IV, vous connaissez sûrement Laetitia Blanchard et Yael Vuilleminroy qui étaient responsables de cette formation ?
Francisco : Oui exactement, je les connais toutes les deux. J’ai donné des cours de 1994-1995 à 2007-2008, j’étais professeur en droit des affaires entre la France, l’Espagne et l’Amérique latine.
J’ai rédigé un article cette année d’ailleurs sur la présentation de cette formation pluridisciplinaire pour les étudiants passionnés par la culture hispanophone et lusophone. Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Francisco : J’ai donné aussi des cours à l’IAE, l’Institut d’administration des entreprises. A cette période-là, j’ai été nommé secrétaire général de la Fédération européenne de Chambres de commerce espagnoles à l’extérieur et j’avais établi le siège de la Fédération européenne à Bruxelles entre 1995 et 1996. C’était mon premier mandat, il y a eu après un deuxième mandat en 2000-2001. Ensuite il a été décidé de nommer un directeur fixe à Bruxelles et un secrétaire général de chaque pays de la Fédération pour assumer la représentation tous les 5-6 ans.
Auriez-vous un message à faire passer aux jeunes entrepreneurs qui liront cette interview ?
Francisco : Lancer une activité sur le terrain international dans le monde actuel, en plein changement, exige beaucoup de flexibilité et de compétences. Il faut donc, avec des objectifs clairs et concrets, avoir de bonnes sources d’information, établir des relations avec de multiples réseaux et s’entourer de personnes et d’organisations qui vous donneront de bons conseils mais surtout qui vous rendront visibles et crédibles auprès de vos interlocuteurs. Je pense bien sûr, aux Chambres de commerce.
